Le Monde diplomatique, juin 2017


Le rêve américain au miroir du basket-ball

Par Julien Brygo

Avec près de trente millions de joueurs occasionnels, le basket-ball compte parmi les sports les plus populaires aux États-Unis. Selon qu’il est pratiqué sur le parquet des Chicago Bulls, dans les rues d’un ghetto noir ou dans l’université d’une petite ville de l’Indiana, il revêt des fonctions sociales très disparates.

Assis sur son lit dans une chambre bien rangée, un gamin noir
contemple le drapeau de son équipe fétiche, les Knicks de New York. Il
porte le maillot de Kristaps Porziņģis, un joueur letton recruté en 2015
pour 6,5 millions de dollars annuels, qui prête sa voix à cette
publicité de l’Association nationale de basket-ball (NBA en anglais) : « Ça
a toujours été mon rêve, depuis que je suis gamin. J’ai pris le ballon
en mains et je ne me suis jamais retourné. En fin de compte, si tu
travailles dur, tout devient possible, même pour un joueur issu d’un
petit village letton. »

L’Amérique raffole d’histoires sociales édifiantes. Et le
basket-ball la gâte. Un vendeur de rue nigérian sans papiers en Grèce —
Giannis Antetokounmpo — qui apprend à jouer en 2007 et devient dix ans
plus tard l’un des meilleurs joueurs de la ligue. L’athlète le plus
petit du circuit — Isaiah Thomas, 1,75 mètre — qui devient candidat au
titre de meilleur joueur de l’année en 2017. L’enfant d’une mère
adolescente placé en famille d’accueil — LeBron James — qui revient dans
son État de naissance et offre à la ville de Cleveland son premier
titre sportif en cinquante ans, tous sports confondus…

Bienvenue dans la ligue professionnelle de basket américaine, où la valeur
cumulée des trente équipes, ou « franchises » (36,3 milliards d’euros),
dépasse aujourd’hui le produit intérieur brut (PIB) du Mali, du Sénégal
et du Burkina Faso réunis. Grâce à la stratégie échafaudée par M. David
Stern, commissaire de l’association de 1984 à 2014, qui a misé sur la
vedettisation des joueurs et sur l’exhibition de leurs trajectoires
sociales, l’argent a coulé à flots : les recettes annuelles des
franchises NBA sont passées de 150 millions d’euros au début des années
1980 à 5,5 milliards en 2016. Les nouveaux contrats de diffusion à la
télévision, source principale de cette avalanche de billets verts, ont
atteint la somme mirobolante de 24 milliards de dollars sur neuf
saisons. Regardée et imitée partout dans le monde, la ligue exalte le rêve
américain (…)

[Le rêve américain au miroir du basket-ball, Le Monde diplomatique, juin 2017. Lire la suite ici.]

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