Rencontre avec Ali Boulo Santo Cissoko, griot sénégalais méconnu et dépositaire du patrimoine mandingue traditionnel  par la kora à 22 cordes (instrument d'Afrique de l'Ouest, créé au 13ème siècle sous l'empire de Soundjata Keita).


Interprétation des titres Nunto et Macky (qui figurent dans l'album Nunto, sorti en décembre 2016) ainsi que Chedo (morceau également accordé en "Tomora", grille qui serait la plus ancienne de la kora, avec mi, la et si bémols).


Site internet pour se procurer le disque et soutenir Ali Boulo Santo, artiste autogéré : aliboulosanto.com/

Son : Nicolas Mas
Image : Julien Brygo
Montage : Matthieu Parmentier et Julien Brygo

Avec le soutien de Danièle Labanère.

For the people (Washamba Wenza, Nairobi)

Réalisation : Julien Brygo – avril 2013.

« Tu sais, nous, ici, le Hip Hop, ça passe pas à la télé ! Y’en a que pour la Rhumba ou les clips de la pop américaine ! Et puis faire un clip, c’est super cher pour nous. Au moins 10 000 shillings kenyans (100 euros) ! » Ni une ni deux, on monte l’opération. Filmer, en trois heures, un clip de hip hop digne de ce nom. À 17h30, en cette fin de journée d’avril 2013, c’est la même bataille de la lumière qui s’engage : il pleuviote, il fait sombre, les lumières se font rares. Ni chien, ni loup, une chute soudaine de la lumière.
Commence alors une longue quête, à bord d’un matatu – ces petites camionnettes de fortune qui font office de bus populaires à Nairobi – de toute lumière susceptible de rendre leurs visages visibles. Après vingt minutes de trajet, on trouve une publicité géante, à la lumière blanchâtre, adossée à une résidence grillagée et sécurisée : on se gare avec le matatu. Les renforts ne tardent pas à arriver : la voiture qui était garée par hasard sur ce parking se retrouve réquisitionnée pour les besoins du tournage, puis arrive le père de Flamez, Olendo, à bord de sa Toyota. Ses phares serviront à éclairer la scène. Tandis que je me débats avec les sources de lumière, Flamez et ses potes fixent l’objectif et dansent « For the people », un des derniers titres de ce jeune rappeur kenyan.
On est dans le quartier de Ngara, au sud de l’hypercentre de Nairobi. Un quartier mi-populaire, mi-petites classes moyennes. Maisons de tôle, marché de légumes et de vêtements, ruelles défoncées, sol boueux et vestiges de la période coloniale britannique constituent le décor de « For the people », chanson composée par Flamez.
Flamez, c’est le renard qui me loge à Nairobi. Accompagné de ses potes du crew « Washamba Wenza » (littéralement : « Nous, les paysans »), il a grandi dans la culture de rue de Nairobi. Entre les Mungiki, ces milices populaires qui se chargent elles-mêmes de la sécurité des quelque 143 bidonvilles encerclant Nairobi, et les forces armées (police, armée et agents de sécurité privés ; ultraprésentes), Flamez et ses potes ont su se débrouiller et tracer leur route, entre petits boulots et projets collectifs. Celui-ci, le crew Washamba Wenza, ils en sont fiers : du Hip Hop pur jus, très influencé par les pionniers américains tels Tu Pac ou Snoop Doggy Dog…

Ce jour-là, donc, c’est Flamez et ses potes qui ont monté l’opération. Dessin sur des pancartes toute l’après-midi, habillage à la mode kenyane, répétitions… En quelques heures, ils rassemblent une bonne vingtaine de personnes : figurants et chanteurs. Ses parents, son frère et sa sœur se sont mis sur leur « 31 ». Bientôt, l’équipée déambulera dans les ruelles de Ngara, arborant des pancartes qui affichent des slogans pour le moins œcuméniques : « Unité », « Écoutez », « Pour le peuple », « Ne perdons pas espoir », « pas de fatalité »… Ces phrases résonnent sur les murs du quartier comme pour conjurer le sort et accélérer la sortie, les sorties :  de la pauvreté, de la corruption, de l’oppressante mainmise des puissants, hommes d’affaires et politiciens...

Ce clip, « For the people », témoignage de cette culture populaire vivace dans les quartiers populaires de Nairobi, au Kenya.
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